La Belgique, terre de compromis !

Non, non ! Je ne vais pas vous parler des compromis indispensables dans le cadre du dossier BHV (Bruxelles Hal Vilvorde) tant médiatisé ces dernières semaines. Je vais vous parler d'autres compromis indispensables dans un dossier qui n'est, finalement, pas très différent dans la forme que celui qui a fait chuter le gouvernement.

A Verviers, une majorité communale désire faire passer en force un projet totalement imbuvable pour la minorité communale, des citoyens de plus en plus nombreux et un nombre très représentatif de commerçants. Les lecteurs les plus assidus de ce blog auront compris que je veux parler du dossier BHV (Bâtiment Hollandais à Verviers).

La semaine dernière a vu un événement tout à fait inhabituel se produire : majorité et opposition ont décidé que les diplomates prendraient plutôt le pas sur les hommes d'action. L'époque serait aux tables rondes et à la détente(1). C'est du moins ce qu'ils veulent laisser parraître, mais qu'en est-il réellement ?

Tout d'abord, les parties sont d'accord de dire que la réunion a été amicale, que tout le monde a écouté tout le monde, que la voie du dialogue a été trouvée. L'opposition est venue avec des propositions, la majorité a pris note et va faire son rapport au conseil communal. Bref, il semble que cette réunion aura été cordiale et constructive !

Mais que propose donc l'opposition ?

Pour les deux partis (Ecolo et cdH), le problème number one est la mobilité telle que définie dans le nouveau PCM (Plan Communal de Mobilité) et plus particulièrement l'accès et la sortie du centre-ville. La proposition est donc de créer quatre ou cinq parkings au lieu d'un seul sous le centre commercial. Ceci permettrait de distribuer équitablement les chalands au centre-ville, de répartir le flux automobile et d'éviter la confiscation de la plupart des clients par le centre commercial. La diminution du parking sous le centre commercial permettrait également de conserver la trémie et donc un accès plus facile au centre-ville et aux autres parkings.

Le second problème important est d'éviter la création d'un centre commercial autarcique. Pour cela, il faut encore travailler l'architecture et faire en sorte que le centre commercial soit ouvert vers les autres commerces. Il est également suggéré de faire un centre commercial en plusieurs bâtiments au lieu d'un seul bloc et de laisser une zone verte significative le long de la Vesdre. Ecolo a aussi insisté sur la nécessité d'organiser une consultation populaire.

Voilà quelque chose qui ressemble fort à un compromis équilibré entre les deux camps et qui pourrait peut-être satisfaire tant ceux qui souhaitent ce centre commercial que ceux qui y sont opposés pour diverses raisons. Personnellement, j'attend de lire la position de Vesdre-Avenir et du nouveau groupement des commerçants à ce sujet pour savoir si ce plan est en mesure de les satisfaire.

Ma grande crainte, c'est que cette réunion "cordiale et constructive" n'ait été qu'un immense show médiatique. Le bourmestre a précisé à la presse depuis lors qu'il n'était pas question de revoir le PCM, qu'il est impossible de réduire le parking ForumInvest, que l'architecture du centre commercial ne sera pas revue et que la consultation populaire était hors de question. Bref, Claude Desama (et son équipe) semble continuer à faire cavalier seul et à imposer unilatéralement son projet !

Un coup de force à la BHV, quoi !

Mais est-ce que l'opposition et les citoyens possèdent une sonnette d'alarme ?

La réponse est oui ! L'arsenal des opposants se trouve dans toute une batterie de recours qui peuvent être activés pour empêcher un projet de prendre forme. Des actions à la Région Wallonne et au conseil d'Etat peuvent facilement prendre plusieures années et on peut obliger le promoteur à ne rien entreprendre pendant ce temps, vu le caractère irrémédiable de toute construction ou démolition. Pour ce faire, il ne suffit donc pas d'introduire un simple recours mais il faut bien déposer en même temps un recours en suspension pour préjudice grave et difficilement réparable. Dans ce cas, l'interdiction de commencer les travaux peut être décidée tant que les recours ne seront pas examinés et qu'une décision soit rendue.

Cette "mise au frigo" du projet ForumInvest peut très bien aider les opposants à dégager une solution négociée. En effet, les recours pouvant prendre un temps assez long, il est plus rentable de trouver un compromis que d'attendre qu'une décision de justice soit rendue. La logique des choses serait qu'un compromis soit dégagé maintenant, mais pour ce faire la majorité doit inviter à la table ronde non seulement l'opposition, mais aussi des groupements comme Vesdre-Avenir ou les commerçants de Verviers. Ces deux derniers groupements sont représentatifs d'une grande part de la population et des forces vives de Verviers; ils ont donc de ce fait une légitimité non négligeable.

Mais connaissant les idéaux démocratiques du bourgmestre, surtout en ce qui concerne les mouvements citoyens et les consultations populaires, je pense que notre sonnette d'alarme sera tirée un jour ou l'autre.

Dommage ...

Verviers, terre de compromis ? Je ne crois pas.


(1) Paul Volfoni, Les tontons flingueurs, texte d'Audiard.